L'Hebdo #088 : Investir dans le marché chinois, l'impact de la dissolution de l'Assemblée sur le marché de l'immobilier et le CAC 40 qui connait sa pire semaine depuis 2022
📈 Les news qui ont fait bouger les marchés cette semaine
1. Hors marché français, la semaine se termine sur un ton prudent
Les tensions en Europe entraînent une attitude plus prudente à l'échelle mondiale, les investisseurs gravitant autour des secteurs défensifs et des obligations d'État. À la suite d'une défaite au Parlement européen, le président français Emmanuel Macron a annoncé des élections anticipées en début de semaine. L'agitation politique et l'incertitude liée aux élections font baisser les actions européennes, le Stoxx 600 étant en passe de connaître sa pire semaine depuis le mois d'octobre. Le dollar américain s'est apprécié par rapport aux principales devises mondiales, tandis que les rendements des bons du Trésor ont baissé, le rendement à 10 ans tombant à 4,22 %. Le pétrole WTI est en légère hausse et en passe de connaître sa meilleure semaine de hausse depuis le début du mois d'avril. Aussi, les obligations se redressent alors que les marchés envisagent des réductions de taux. L'un des mouvements les plus notables de ces derniers jours a été la forte baisse des rendements obligataires, qui a permis aux obligations de qualité d'afficher leur plus forte hausse hebdomadaire depuis le début de l'année. La hausse des obligations s'explique par la combinaison d'un sentiment de découragement du risque en Europe, de signes d'assouplissement du marché du travail américain et de nouvelles encourageantes concernant l'inflation.
2. La Fed maintient son taux directeur
Comme prévu, la Réserve fédérale a maintenu son taux directeur à 5,25 % - 5,50% lors de la réunion de mercredi. Outre la décision sur les taux d'intérêt, la réunion s'est accompagnée d'une mise à jour des projections économiques de la Fed. Sur le front de l'inflation, les projections de la Fed prévoient que l'inflation de base des dépenses de consommation personnelle (PCE) terminera l'année à 2,8%, ce qui est supérieur à la projection de mars de 2,6%.Les projections pour les réductions de taux de la Fed en 2024 ont été réduites de trois en mars à une seule dans le communiqué d'aujourd'hui. Alors que les prévisions de baisses de taux ont été réduites pour cette année, les projections ont montré que les responsables de la Fed prévoient désormais quatre baisses de taux en 2025, contre trois en mars, et quatre baisses de taux en 2026, le point final en 2026 restant inchangé par rapport aux prévisions de mars. Lors de sa conférence de presse, le président de la Fed, Jerome Powell, a réaffirmé que la Fed resterait dépendante des données et qu'elle devrait constater de nouveaux progrès en matière d'inflation dans les mois à venir avant d'acquérir la confiance nécessaire pour commencer à réduire les taux. Le président Powell a toutefois rappelé que les décideurs de la Fed sont conscients des risques liés au maintien d'un taux directeur restrictif pendant trop longtemps.
📰 Le dossier de la semaine : Investir dans le marché boursier chinois : entre conviction et autosatisfaction
Les récentes hausses des bourses asiatiques, après plusieurs années de déception, sont soutenues par l'amélioration des données économiques, mais aussi par la crainte des grands fonds internationaux d'être écartés d'un rallye qui pourrait devenir durable dans le temps.
1. La bourse chinoise : un retour en force après trois ans de déceptions
Quelque chose a changé en Chine. Si la bourse chinoise et les fonds d'investissement qui lui sont liés n'avaient connu que des déceptions sous forme de pertes importantes au cours des trois dernières années, ils multiplient depuis quelques mois les gains, avec des rendements de plus de 10 % dans de nombreux cas. Le géant asiatique est à nouveau dans le collimateur de tous les courtiers internationaux, dont les analystes sont partagés entre un optimisme modéré à l'égard des données économiques du pays et de ses entreprises, une certaine prudence quant à la durabilité de sa reprise et le syndrome FOMO. Ce dernier est un acronyme pour Fear of missing out (peur de manquer). Dans le domaine boursier, la peur de manquer, c'est la peur que d'autres prennent des positions sur un marché qui pourrait être plus que rentable à long terme.
Goldman Sachs Asset Management nous rappelle que la croissance du PIB "a certainement été un point positif pour la Chine", atteignant son objectif de 5 % l'année dernière et maintenant cette trajectoire au premier trimestre 2024, après une hausse de 5,3 % en glissement annuel. Chez Generali Investments, on estime qu'il ne faut pas oublier que le pays abrite encore un tiers de la capacité manufacturière mondiale et contribue à hauteur de 18 % au PIB mondial. Evelyn Huang, gestionnaire de fonds chez Fidelity International, explique que les bénéfices des entreprises restent solides et que la dynamique est positive dans la plupart des secteurs, à l'exception des services financiers. Pour Allianz GI, il est également important que les décideurs politiques aient intensifié leurs efforts pour aider à stabiliser le secteur de l'immobilier, en prenant des mesures pour remédier à la fois au manque de demande et à l'offre excédentaire.
2. Mais la prudence reste de mise malgré la reprise
Mais tous ces points de vue ne sont pas positifs, de nombreux analystes appelant à la prudence. Par exemple, John Woods, responsable des investissements en Asie chez Lombard Odier, estime que s'il est vrai que la croissance du PIB au cours des trois premiers mois de 2024 a dépassé les estimations, "les données économiques publiées depuis mars ont été décevantes, notamment les baisses des ventes au détail et de la croissance de la production". Et, ajoute-t-il, le secteur immobilier "montre peu de signes de vitalité et continue d'enregistrer des baisses de prix et de volumes de vente dans les grandes villes". Le dernier "mais" dans ce domaine est celui d'Axel Botte, responsable de la stratégie de marché chez Ostrum, qui estime qu'il y a un certain retour au protectionnisme, que les relations internationales actuelles sont de plus en plus tendues, tant sur le plan commercial que géopolitique, et que la surcapacité de la Chine constitue une menace existentielle pour l'industrie dans les économies occidentales.
Outre les avantages et les inconvénients macroéconomiques, le débat porte sur la question de savoir si les actions chinoises sont chères ou bon marché. Selon Andrés Allende, gestionnaire du fonds Paradigma Value Catalyst d'A&G, les actions locales ont un énorme potentiel de hausse, avec une décote de plus de 30 % par rapport aux autres marchés émergents. Bien que la valorisation soit importante, elle ne serait pas suffisante en soi, dit-il, si ce n'était du fait que de nombreuses sociétés cotées sont "de très bonnes sociétés avec une croissance soutenue des ventes et des bénéfices, bien supérieure à deux chiffres, et qui versent des dividendes".
3. Opportunités et risques du marché chinois à long terme
Mariano Guerenstein, de J. Safra Sarasin Sustainable AM, n'a aucun doute sur le fait que "la Chine est bon marché". Selon lui, à court terme, il s'agit sans aucun doute d'un marché attrayant, malgré sa forte volatilité possible, mais "il l'est encore plus à long terme, c'est-à-dire structurellement". Selon lui, ce n'est pas seulement parce que son économie est en croissance et que le gouvernement semble déterminé à créer des conditions favorables pour restaurer la confiance, mais aussi parce que les investissements internationaux sur ce marché sont sous-pondérés et que cela "doit tendre à être corrigé".
Selon Fidelity, si les valorisations sont attrayantes par rapport à d'autres régions et à la moyenne historique du marché boursier chinois, l'investissement dans les actions chinoises n'est pas sans risque. "Le secteur de l'immobilier est un frein car il continue de lutter pour établir la nouvelle approche de la croissance. De plus, le taux de chômage, surtout chez les jeunes, est trop élevé. Enfin, la déflation est un risque réel en Chine".
Lombard Odier estime même qu'une explication plus pessimiste peut être donnée au rallye de ces derniers mois. L'explication est que "l'économie chinoise s'affaiblit au point que les investisseurs locaux considèrent qu'une dévaluation du yuan est inévitable et tentent donc de convertir leur monnaie locale en dollars de Hong Kong et/ou en or".
Le sentiment qu'après des années de sécheresse des rendements, l'heure de la reprise a sonné est largement répandu parmi les professionnels de l'investissement, malgré leur attitude encore prudente. Pour la grande majorité d'entre eux, le syndrome FOMO susmentionné, ou la peur de passer à côté d'une manne de rendements, est le thème sous-jacent.
🏠 Immobilier : Dissolution de l’Assemblée nationale : quels impacts pour le marché de l’immobilier ?
Le marché immobilier français est en crise, et l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale n’a fait qu’aggraver la situation. Cette décision a provoqué une onde de choc parmi les professionnels du secteur, qui attendaient des mesures fortes pour soutenir le marché du logement. Mais que signifie exactement cette dissolution et quelles en sont les conséquences pour l’immobilier ?
Cette situation crée une instabilité politique qui inquiète les investisseurs et les acheteurs. Loïc Cantin, président de la FNAIM, explique que cette instabilité politique génère également une instabilité économique. En d'autres termes, si le gouvernement change fréquemment, les gens hésitent à investir dans l'immobilier car ils ne savent pas quelles seront les futures lois ou politiques économiques.
Cette décision a également arrêté net plusieurs projets de loi importants pour le marché immobilier. Par exemple, des lois qui devaient faciliter la création de logements abordables ou la transformation de bureaux en appartements sont maintenant en suspens. Danielle Dubrac, présidente de l’Unis, souligne que cette situation complique encore plus le marché locatif, déjà en difficulté, surtout en période de recherche de logements pour les étudiants.
Enfin, cette dissolution a des conséquences sur les taux d’intérêt. Les Obligations Assimilables du Trésor (OAT), qui sont des emprunts d’État à long terme, ont vu leurs taux augmenter de 0,5 % en seulement deux jours à cause de l'incertitude politique. Cela signifie que les prêts immobiliers vont probablement devenir plus chers, ce qui décourage encore plus les acheteurs. Henry Buzy-Cazaux, président de l’IMSI, avertit que sans stabilité et confiance, les ménages seront réticents à s’endetter pour acheter des biens immobiliers.
En bref, la dissolution de l’Assemblée nationale ajoute une couche d’incertitude à un marché immobilier déjà fragile. Les professionnels du secteur sont inquiets et appellent à une stabilité politique et des mesures concrètes pour sortir de la crise. A suivre.
🏦 Investissement : Le CAC 40 connaît sa pire semaine depuis le début de la guerre en Ukraine en 2022
Le CAC 40 a chuté de près de 2,7% ce vendredi, pour clôturer à 7 503,27 points, affecté par l'incertitude provoquée par la dissolution de l'Assemblée nationale. Bien que les investisseurs n'aient pas totalement abandonné, le marché, naturellement réfractaire à l'incertitude politique, a été nerveux toute la semaine. Sur la semaine, l'indice a reculé de 6,2%, marquant sa pire performance hebdomadaire depuis celle du 4 mars 2022, après le début de la guerre en Ukraine. L'indice a ainsi effacé tous ses gains de 2024, affichant désormais une perte de 0,53% depuis le 1er janvier.
1. Ruée sur la dette allemande
L'incertitude politique en France a pesé sur l'ensemble des marchés européens, notamment sur la Bourse de Paris. "La possibilité que des partis souvent extrémistes et sans expérience de gouvernement prennent le pouvoir inquiète", explique Sebastian Paris Horviz, directeur de la recherche de LBPAM. Le marché craint que des formations populistes, comme le Rassemblement national, instaurent des politiques affaiblissant les finances publiques françaises déjà fragiles.
"Face à l'incertitude croissante dans la deuxième économie de l'Union européenne, les investisseurs recherchent la sécurité et réduisent temporairement leur exposition aux actions de la région", note Pierre Veyret, analyste technique chez Activtrades.
Cette aversion au risque pousse les investisseurs vers des actifs sûrs, notamment les obligations allemandes. Le rendement des obligations allemandes à 10 ans a baissé de 11,5 points de base, atteignant 2,361%, contre plus de 2,60% la semaine précédente.
2. Les banques toujours en difficulté
Paradoxalement, la dette française bénéficie aussi de ce mouvement. Le taux des obligations françaises à 10 ans a baissé de 6 points de base à 3,116%, revenant près de son niveau antérieur à la dissolution (3,103%). Toutefois, l'écart de rendement avec les obligations allemandes, appelé "spread", s'est accru, atteignant environ 73 points de base, et dépassant même 80 points de base au cours de la journée.
"Nous pourrions facilement voir le spread entre la France et l’Allemagne dépasser les 80 points de base dans les semaines à venir, voire atteindre 100 points de base", estime Matthieu Bailly, PDG d'Octo AM. Capital Economics pense également qu'un écart de 100 points de base pourrait devenir la nouvelle norme.
3. Performance des valeurs
Presque toutes les valeurs du CAC 40 ont terminé en baisse vendredi, sauf Dassault Systèmes. Thales (-6,7%) et Axa (-4,9%) ont particulièrement souffert. Les banques ont également été malmenées : Société Générale a perdu 3,57%, Crédit Agricole SA 2,98% et BNP Paribas 2,65%.
Sur les autres marchés, l'euro a encore baissé de 0,5% face au dollar, s'échangeant à 1,0688 dollar. Le pétrole, en revanche, a légèrement progressé. Le Brent de la mer du Nord a gagné 0,4% à 83,09 dollars le baril, et le WTI coté à New York a augmenté de 0,2% à 78,79 dollars le baril.
💸 Les annonces d’entreprises à noter de la semaine :
Thales fournira à l'Ukraine un deuxième système de défense aérienne.
Une filiale italienne de LVMH, spécialisée dans les sacs Dior, a été placée sous administration judiciaire pour avoir sous-traité des travaux à des entreprises chinoises qui maltraitent leurs salariés.
Qatar Holding a démissionné du conseil d'administration de Vinci.
Atos choisit l'offre de plan de sauvetage de David Layani (Onepoint, Econocom et Butler) contre celui de Daniel Kretinsky. Les actionnaires existants seront dilués à moins de 0,1% du capital. Aussi, Atos est en discussions exclusives avec Alten pour la vente de Worldgrid pour 270 M€.
Apple lance l'application ChatGPT sur l'iPhone pour rattraper son retard dans l'IA.
Intel interrompt ses projets de construction d'une usine de 25 milliards de dollars en Israël, selon Calcalist.
GameStop lève 2,14 milliards de dollars en profitant de la frénésie spéculative relancée par Roaring Kitty.
Les producteurs de cognac français "très inquiets" après que l'UE a imposé des droits de douane sur les véhicules électriques chinois. Rémy Cointreau, LVMH, Pernod Ricard et Davide Campari sont concernés.
Danone, DMC, Michelin et le Crédit Agricole Centre France s’associent pour créer une plateforme industrielle de biotechnologie de pointe.
Worldline a réunit jeudi ses actionnaires en assemblée générale dans un climat tendu après plusieurs trimestres de déconvenues.
FedEx prévoit de supprimer jusqu'à 2000 emplois en Europe.
Euronext annonce que le CAC40 reste inchangé et que GTT et Spie remplacent Soitec et Pluxee dans le CACNext20. Ces deux dossiers sont reversés dans le CACLarge60. Casino et Esso entrent dans le SBF120, dont sortent Solutions 30 et X-Fab. Les changements seront effectifs le 17 juin.
Accor et LVMH ont conclu un partenariat stratégique en vue d’accélérer le développement d’Orient Express.
UBS céderait les activités chinoises du Crédit Suisse un fonds d'état.
Mercedes va investir 360 millions de dollars dans l'État indien du Maharashtra.
Source : Les Echos, Investir, Investing, ZoneBourse, Reuters, ABC Bourse